Comprendre son enfant est fondamental, pourtant ce n'est pas inné. Etre parent, ça s'apprend.
Question de Vincent à Marie-Jeanne Trouchaud (formatrice, conférencière, auteure, thérapeute : militante de l’être humain)
Comprendre ses enfants grâce aux neurosciences
Etre parent en 2021, ça peut être merveilleux parce que justement il y a des possibilités de connaître, que l’on n’avait pas.
Moi, quand j’étais jeune maman, je n’avais pas la possibilité de connaître mes enfants. Vous, vous avez la possibilité de les connaître grâce à toutes ces recherches et à toutes les technologies nouvelles.
Donc on y allait un peu à l’estime avec beaucoup de bonne volonté en essayant, en faisant, en pensant, en essayant.
Aujourd’hui, être parent c’est se renseigner. C’est déjà avoir l’intention bien sûr, mais c’est se donner aussi les moyens d’écouter, de lire, de s’intéresser à tout ce qui est la réalité du monde de notre enfant.
Quelles sont ses capacités ?
Les comprendre c'est éviter "le grain de sable dans la machine à bonheur"
Il ne nous viendrait pas à l’esprit de demander à un enfant de soulever un poids de 15 kilos alors qu’il le fera aisément lorsqu’il sera adulte, même plus de 15 kilos.
Pourtant, quand on dit à un enfant « mais enfin arrête de t’énerver, soit sage », on lui demande quelque chose qu’il est incapable de produire. On lui demande quelque chose qui est aussi difficile pour lui que de soulever un poids de 15 kilos .
Les neurosciences le montrent, un enfant ne peut pas se calmer tout seul parce que justement son cerveau n’est pas mature. Il n’a pas les moyens de se calmer donc on lui donne un ordre absolument absurde.
Il finit par étouffer ses sanglots parce qu’il ne peut plus souffrir et il faut qu’à un moment, ça s’arrête et à ce moment-là, il y a des parents qui disent « ça marche » sauf qu’on a broyé des émotions de nos enfants et ça met des années à guérir.
Moi, dans ma profession de thérapeute, je vois à quel point des gens de 50-60 ans peuvent encore être blessés parce qu’ils ont entendu ou parce qu’on leur a fait. C’est ce que j’appelle « le grain de sable dans la machine à bonheur ». Un enfant lorsqu’il nait, pour moi, c’est une machine à bonheur. Il est très adapté à la vie. Quand tout va bien, il babille, il sourit. Quand ça ne va pas, il pleure. C’est très simple et puis petit à petit, on va lui apprendre qu’il ne devrait pas pleurer, qu’il ne devrait pas sourire comme un bêta, qu’il ne devrait pas sauter dans les flaques d’eau, qu’il ne devrait pas avoir peur de ceci, qu’il ne devrait pas être en colère quand il a une injustice. On va lui apprendre que ce qu’il ressent au plus profond et au plus sacré, il ne devrait pas le ressentir et là, c’est vraiment ça que j’appelle le grain de sable dans la machine à bonheur. Ca va gripper la machine et ça va donner justement quelque chose qui n’est pas bon :
– « alors comment je fais ?
– Qu’est-ce que je dois faire pour faire plaisir ?
– Qu’est-ce que je dois faire pour être aimé ?
– Qu’est-ce que je dois faire pour être conforme ?
– Qu’est-ce que je dois faire pour que papa et maman soient contents ? »
Et quand l’enfant prend cette habitude-là de fonctionnement, ça lui reste adulte.